mercredi 31 août 2011

30. Crushed Butler : Uncrushed :

Encore un très bon groupe sixties obscur. J’y suis arrivé par un article sur Jesse Hector dans la revue Dig it : « J’ai un voisin, c’est Jesse Hector. Tu ne dois sûrement pas connaître, vous ne connaissez pas Jesse Hector en France ? » Mais si, ce français-là connaissait. Et il songeait même à un commerçant toulousain Benoît qui, à l’écoute de ce nom, faisait trois fois le tour du magasin en courant. C’est ce vendeur-là justment à qui j’ai demandé du Jesse Hector et qui m’a présenté son groupe Crushed Butler. Il s’agit d’un digipack d’un album six titres avec en bonus track une version différente du sixième titre. Un petit dépliant carré explique un peu à quoi on a affaire, en mettant en valeur non pas Jesse Hector, mais son leader Darryl Read. D’un côté de la page dépliante, on a une bande dessinée où le trio est présenté comme de gros cromagnonnesques sous des habits pré punk. La première case de la BD reprend un extrait d’article de presse dont la photo apparaît juste au-dessus. Je souligne la phrase reprise : « ‘Crushed Butler’ was the first group on, their music is heavy, three ugly, heavy musicians playing music to match, very enjoyable, they have return visit to City on March 2nd, try and make it if you are free, I think that they have the potential to be very very Big. » On remarque aussi des annonces de concerts, tantôt avec Slade, tantôt avec Atomic Rooster ou Mott the Hoople. Evidemment, Crushed Butler est écrit en bien plus petit. Sauf pour une annonce du 25 avril : « Dance to Crushed Butler plus Hocus Poke ». On a aussi ceci qui semble faire écho au titre du splendide album live des Rolling stones de 69 : « Get yer end away » with Crushed Butler. Un autre article de presse est cité avec des ajouts au stylo : « Hey you Big Punk !, look at this !!...... » Au revers du dépliant, écrit petit, tout un article sur le groupe et Darryl Read.
L’album Uncrushed est sous-titré « First punks from the British Underground 1969-1971 » et la BD rappelle qu’ils étaient la ripôste au flower power. Les chansons sont des compositions de Read et Hector. Le premier titre It’s my life est de 69. L’album s’ouvre sur un solo de batterie. Quelques notes de basse et batterie hésitent à se lancer, puis ça part comme une bombe, le chanteur est propulsé avec sa voix hardeuse, et naturelle incursion dans un motif de Bo Diddley. Quoique courte, la chanson repart en structure couplets-refrain avec un solo final sur un motif de Bo Diddley toujours. Les titres 2 à 5 sont de 70. Le second titre Factory Grime, sorti en 45 tours, fait penser aux Who. Il a une structure d’envoi orgasmique et il se libère dans un refrain à la voix traînante doublée par l’étirement de plénitude et domination des instruments. Les syncopes sont hardeuses, façon d’époque, Black night de Deep Purple, etc. Avec ses notes appuyées, le troisième titre a un groove rock entraînant. Pas pour rien, le titre est Love is all around me. Nous sommes conviés à la grande fête rock, ça bombarde grâce à de mutliples idées. La batterie a l’air de cavaler. La guitare plan au-dessus… du cheval galopant. Avec My son’s alive, on est déjà dans les transudations un peu folles. C’est con comme le français n’ait pas repiqué l’adjectif « bombastic » aux anglais, je pourrais l’employer ici. C’est pourtant un morceau en grande partie dans la rétention, puisqu’il joue sur la libération de parties guitare ou l’élévation du refrain. Le rythme est pompé à mort et renvoie à de nouvelles prouesses à la moitié du titre, le dernier tiers a l’air de donner le pas au retour destructeur par étiolement du morceau. C’est ensuite le temps fort du malaise anti flower power avec Love fighter, tension glaciale, sauf que c’est de la glace pilée vu les chutes rythmiques des instruments. Un truc que je trouve génial, c’est le doublage de la voix criant Love fighter. La voix criante vient de loin et chantant moins haut une deuxième voix a été enregistrée en avant qui répète en même temps « Love fighter » de manière plus posée. Alos que la première voix crie et s’étouffe, la deuxième dure un peu plus longtemps et fait sentir tout le souffle de son haleine en inspirant plus profond. L’album se termine par deux versions de High school Dropout, titre de 1971. Il s’agit d’un rock’n’roll. On pense à Gene Vincent. Le matraquage instrumental n’est pas à la Gene Vincent, mais la voix si. Très bon. Comme les chansons sont courtes, comme l’album, la deuxième version, instrumentalement plus feutrée, enchaîne sans problème.
Un mot pour finir. Difficile de parler de pré punk. Il est déjà très embêtant de parler de punk sixties pour les groupes américains Sonics, etc. En même temps, beaucoup de groupes punks jouent purement et simplement du rock. J’ai deux volumes CD d’une compilation Les Plus grands succès du punk (sous-entendu français). Pour moi, c’est du rock tout simplement. Avant Never mind the bollocks, les Sex Pistols ont clairement un son rock. Les New York Dolls sont entre les stones et le son de bien des punks. Lers Stooges ont aussi pas mal annoncé la forme punk. Le son punk n’est certainement pas la dominante des Clash. Pourtant, le son punk existe bien avec Never mind the bollocks à tout le moins et avec son héritage rock, notamment par les Replacements. Pour Crushed Butler, la comparaison me vient plus spontanément encore avec les MC5. Et c’est cette sauvagerie précoce comparable au MC5 qui pose Crushed Butler en jalon historique vers le punk rock. Je veux bien croire qu’ils aient pu voler la vedette sur scène à des groupes plus connus. Leur sauvagerie reste rock, c’est-à-dire inspirée, rythmée et harmonique. Le hard est beaucoup plus dans la succession de motifs voyants et la grandiloquence un peu creuse. Le hard ne fait pas danser, il n’a pas de groove. Un solo n’y a pas d’âme, un riff n’y a pas de rythme. Le hard fait sursauter, il prend l’oreille, il dit : « regardez-moi, j’ai bien tapé sur la batterie, j’ai bien éraillé ma voix, j’ai la saturation du son à la guitare, regardez si ce riff est bien lourd, regardez si je joue vite. » Il rejoint même le rock progressif : « Regardez si ces notes ne vous remplissent pas d’une émotion d’orgueil, d’amour, d’un appel à la méditation, etc. Regardez si le plan de ma composition n’est pas compliqué, équilibré entre un truc grave, un truc aigu, un truc saturé, un truc silencieux, une mélodie de ceci, une mélodie de cela. Regardez si je n’ai pas progressé comme pour raconter une histoire, regardez si je ne suis pas de la musique classique avec mon introduction, ma conclusion, mon crescendo, etc. » Je ne crois pas que ce soit la meilleure voie pour faire de la musique. Le punk ou le rock garage c’est quant à lui un peu perdu dans l’effet sale et l’attitude à avoir : « Joue-moi un un truc sale, joue-moi un riff qui le fait ». Le mieux, c’est quand même de jouer du rock, simplement un peu plus fou.


29. The Move : The Move :



Je n’ai jamais apprécié Electric Light Orchestra, mais il en va autrement des formations antérieures The Move et Idle Race. Des Move, je posssède une compilation 2 CD orange, l’album Shazam et cette édition 2 CD du premier album The Move : Deluxe 2 – CD expanded edition. The Move était un des principaux groupes à succès anglais de 66 à 68. En 1991, Svengali disait : « Without doubt, it was The Beatles, the Stones and The Move in that order in England. » Cette phrase est citée sur mon livret, je reproduis même la perfide coquille du « t » miniscule pour « the Stones ». Mais le livret d’un album des Move prteste tout de même. Svengali a oublié les Who, les Kinks et les Small faces pour cette époque déjà limitée à 66-68.
Il faut dire qu’à part de vrais fans des sixties comme moi, les fans de rock qui daignent écouter du sixties n’écoutent pas le moins du monde les Kinks ou les Small Faces. Je n’ai jamais compris où ça coinçait, mais c’est un fait. Je n’ai que quelques amis qui écoutent de temps en temps un titre des Kinks, un, il est vrai, est fan. Moi, ça me dépasse que ça soit ainsi confiné aux sixties. Alors, je ne m’attends certainement pas à convertir au son sixties très typé des Move qui que ce soit. Le groupe a eu du succès dans les années 60, mais il est complètement oublié aujourd’hui. Moi, je trouve le son hystérique bubblegum un peu spécial, mais j’adore la folie échevelée de leurs compositions-interprétations. Je lance le CD et j’apprécie du début à la fin. C’est dynamique et ça s’impose à l’oreille, sans rester de la musique de fond. J’y trouve une avalanche de trucs délirants, parfois volontairement cocasses. C’est lyrique, les compositions sont de vraies créations. L’oreille ne se branche pas tout à fait sur la performance instrumentale, ce qui doit expliquer leur impossibilité à plaire aujourd’hui. Mais l’oreille se branche sur l’allure du morceau qui porte, sur la succession jouissive des plans.
Le double CD est conçu comme suit. Le premier CD propose en mono les treize titres du premier album original. Les titres 14 à 18 sont les faces A et B des 45 tours correspondants. Le second CD propose ensuite en stéréo 16 versions inédites sous le titre New Movement. Je me concentre sur les 18 titres du premier CD. La quasi-totalité ne manque pas d’intérêt : Yellow rainbow (premier titre avec un son qui n’échappe à un peu de soufflerie, mais c’est pour mieux sentir l’atmosphère comme on l’entend dans les paroles), Kilroy was here, (Here we go round) the lemon tree, Walk upon the water, un temps fort Flowers in the rain, Hey grandma (reprise des Moby Grape qui auront aussi une place dans ma série de collectors), Useless information, la reprise délirante Zing went the strings of my heart, le classique Fire Brigade, Mist on a Monday morning avec sa mélodie sortie de je ne sais quel dix-septième siècle, et encore l’air chantant entraînant dans une musique à chuintements née du psychédélisme Cherry Blossom Clinic. Sur treize titres, je n’ai écarté que Weekend et The Gril outside, malgré l’orchestration au violon. Suivent alors les titres de 45 tours qui sont tous essentiels dans l’histoire du groupe : Vote for me, Disturbance, Night of fear, Wave the flag and stop the train, I can hear the grass grow. Plusieurs de ces titres se retrouvent en stéréo sur le second CD, mais Vote for me et The girl outside sont repris dans des versions différentes. Les inédits sont les deux premiers titres Move intro et Move, puis la plage 9 Don’t throw stones at me. Il y aura encore du très bon Move par la suite. Inutile de détailler chanson par chanson. J’ai essayé de cerner quelque chose d’essentiel à dire sur l’ensemble plus haut, mais l’écoute est nécessaire pour parler plus en profondeur de leurs chansons.

vendredi 12 août 2011

Intermède: actualités et en vrac:

Je me suis arrêté pour les vacances. En même temps, je suis bloqué pour la fiche prévu pour The Music Machine, car j'ai prêté le second CD important Beyond the garage à une amie.
Pour l'actualité rock'n'rollienne, un nouvel album de Bruce Joyner vient de sortir et un concert semble possible à Toulouse vers novembre. Un album inédit de Rory Gallagher est depuis quelques mois dans les bacs, il s'agit du double Notes from San Francisco avec un CD studio et un autre Live. Il s'agit d'un projet avorté. Rory a préféré passer à un profil rock plus marqué avec Photo-finish. Certaines chansons de Photo-finish se rencontrent pourtant sur cet album inédit.
Amy Winehouse est décédée, mais cela tout le monde le sait et il y a un nouvel album des Strokes, groupe pas mal des années 2000.
Les fabuleux Kinks sont réédités en format Deluxe, un CD version mono d'un album, l'autre CD version stéréo. Sur chaque CD des bonus. Prix courant relevé 22 euros. Mais, indépendamment du génie majeur des Kinks, la stratégie commerciale me paraît peu évidente, face aux précédentes éditions que tout le monde possède déjà.
Autre grande nouvelle, un album inédit studio de la grande période de Love, vinyle du catalogue Sundazed.



Bon, vous n'avez plus 14 ans, vous allez bientôt arrêter d'écouter Muse et je ne sais quelles autres billevesées, non?
Au fait, à propos de l'album des Who Meaty Beaty Big and Bouncy, le vinyle présentait des titres classiques mais remaniés. Parmi ces nouvelles versions, il y avait Magic bus avec de l'harmonica. Pas moyen de trouver cela en CD. Surtout, il n'y a pas d'harmonica sur la version CD de Meaty Beaty Big and Bouncy. J'en suis tombé sur le cul à l'époque. Faudra que je réécoute le CD et que je le compare au vinyle. Du coup, cela me donne une nouvelle idée originale de collector's à traiter.