dimanche 6 novembre 2011

Parmi les prochaines entrées

War, The World is a ghetto
Dean Carter, The call of the wild
The Shadows of Knight, Gloria
Les Fleur de Lys / Sharon Tandy
The Downliners sect premier et troisième albums
Kaleidoscope Tangerine dream / Faintly blowing
The Wild magnolias
Al Green Albums traités par quatre
The Easybeats premier et quatrième albums, puis cinquième Vigil
Randy Newman 12 songs
Legend (first album), puis le second, puis Moonshine
David Crosby If I only could remember my name
Screaming Lord Sutch, Rock & Horror
Funkadelic Standing on the verge of getting it on
Parliament Osmium
The Parliaments
The Meters second, troisième et quatrième albums
Betty Davis Nasty gal
D'autres encore, liste non fixée.

38. Funkadelic : Funkadelic :

J’ai encore de nombreux albums à commenter de Funkadelic, de Parliament, voire de George Clinton, de Bootsy Collins, d’Eddie Hazel et aussi des Parliaments. Le CD des titres du premier groupe The Parliaments est quelque peu un collector pour ne rien de la magie d’Osmium, premier album de Parliament qui est en réalité entre Funkadelic et Free your mind le deuxième opus de la formation Funkadelic dans son âge d’or. Funladelic, Osmium, Free your mind, Maggot brain, le live de 71 sorti bien plus tard, c’est la quintessence musicale de l’univers. Suivront pourtant d’autres sommets America eats its young, Cosmic slop et Standing on the verge, d’autres pépites tantôt sous le nom de Funkadelic, tantôt sous le nom de Parliament, parfois même sous le nom de George Clinton. L’intérêt de faire une rubrique pour chaque opus, c’est qu’on peut se rendre dans les grands commerces de CD et découvrir l’absence totale de ces noms sur les étalages funk-soul, même fournis.
Le nom Funkadelic est une manière de concentrer en un seul mot les mots funk, psychedelic et éventuellement la syllabe « del » qui, paraît-il, semblait revenir au jugement du groupe dans maints groupes soul de l’époque. Il ne manque plus que l’allusion à Jimi Hendrix pour avoir une idée de leur musique. Précisons d’ailleurs qu’il s’agit d’une formation de la ville de Detroit, la ville de la Motown, mais aussi d’un certain rock endiablé (Stooges et MC5). Le nom a connu de légères retouches au départ de The Funkedelics à Funkadelic. La formation sixties de Clinton The Parliaments touchait à sa fin avec l’arrivée de nouveaux musiciens, à commencer par le prodigieux guitariste Eddie Hazel. Le groupe changea de look, se défonça par les drogues et explora la folie du rock lourd et des improvisations guitaristiques, ainsi que la dynamique funk. Le choc de l’habillement, de la coiffure allait être poussé loin. En revanche, à côté de sa sublime musique, le groupe ne trouve guère le moyen que de déverser les obscénités potaches à foison. En 68, suite à un conflit opposant George Clinton à sa maison de disques, les Parliaments cèdent la place au groupe Funkadelic qui est signé par Westbound Records. En 69, sortent enfin des 45 tours du groupe sous son nom nouveau, les excellents Music for my mother et I’ll bet you. Ce dernier titre, adaptation d’un plus ancien des Parliaments, sera repris par les Jackson five. Etrangement, un peu après, George Clinton a souhaité lancer en parallèle un autre groupe du nom de Parliament. La distinction musicale entre les deux formations est réelle, mais assez subtile à définir, bien que Clinton l’ait résumée ainsi : les guitares en avant dans Funkadelic, les voix dans Parliament. Les choses furent inévitablement plus compliquées.
L’enregistrement du premier album au simple nom du groupe n’est pas allé sans difficultés. La section rythmique a même eu tendance à lâcher Clinton qui dut alors faire appel à d’autres musiciens parmi lesquels des musiciens de session de la Motown et surtout l’organiste Berni Worrel qui deviendra un pilier du groupe par la suite. Bernie Worrell et Eddie Hazel, deux pierres angulaires du Funkadelic, tous deux bien présents sur le premier opus. L’album n’est pas parfait. Les morceaux longs sont d’une qualité inégale. Le génie devient forcément latent, tant le groupe privilégie les engourdissements répétitifs. Ceci dit, les perles s’accumulent tout de même. Il n’y a pas véritablement de temps faible pour autant. L’album s’ouvre sur un titre de Clinton tout à fait original Mommy what’s a funkadelic. Un texte parlé obscène, agressif dans son discours, sensuel dans la voix, lance la chanson de près de dix minutes. Le titre est très blues et joue de répétitions envoûtantes, rythmées, avec de l’harmonica, de la distorsion. La rythmique propulse en avant un chant parlé avec quantité de bruits de bouche, de phrases décalées. Suivent des versions nouvelles des deux singles I’ll bet you et Music for my mother. Début d’une longue série de mots d’ordre aux faux airs de second degré, James Brown est parodié : « I’m funk and I’m proud ». La guitare d’Eddie Hazel tend à s’affirmer sur ce dernier morceau avec ses chœurs obsessionnels indianisants. Les notes de guitare à la fin du titre donnent le frisson. I’ll bet you semble toutefois plus marquant dans la composition d’ensemble. Le quatrième titre ne dure que quatre minutes et atteint des sommets : I got a thing, you got a thing, everybody’s got a thing. C’est une superposition de merveilles, la guitare courts, les harmoniques sont démentes. Bien que le début de l’album soit de haute volée, le quatrième titre dépasse les trois précédents sans aucune espèce de doute à mes oreilles. C’est déjà Osmium. Les chœurs, la rythmique, l’orgue, la guitare jusqu’à sa distorsion finale terrifiante, les ralentis, les accélérations, et ce petit bruit chatouillant très particulier qui marque parfois le rythme, c’est le génie. Ce titre devint inévitablement le troisième 45 tours du groupe, il sortit au cours de l’année 1970. Un titre soul des Parliaments Good old music est ensuite revisité en rock funk psyché, pour le meilleur. Le titre s’étend alors sur huit minutes entre virages soul et virages psychés, parfois brusquement hendrixiens. Un blues lourd et rock avec envolées guitaristiques suit : Qualify and testify. La rythmique de plomb fait songer à Mannish boy de Muddy Waters, et on constate que les motifs mélodiques les plus réussis des accompagnements de certains rocks lourds sont extraits du mauvais encadrement heavy ou hard rock pour s’écouler dans du bon blues, avec en prime un orgue qui défie Jon Lord. Jimi Hendrix n’est pas loin dans le jeu d’Hazel. Certains diront qu’il faut exiger l’original. Quand même ! Le septième et dernier titre commence par un discours d’extraterrestres dans les chuintements électroniques et circulations atmosphériques. Il s’agit de What is soul avec sa superbe introduction guitaristique qui enchaîne, quelques voix en fond sonore. Le titre se poursuit toutefois par un chant parlé cumulant des discours idiots maladroites aux rires stupides, ce qui en brise la dynamique. Le rythme se tient pourtant, l’ambiance se crée. Le jeu redevient bon quand les paroles creuses se retirent. L’harmonica qu’on peut dire blues et stonien se met de la partie pour le meilleur. L’harmonica n’est pas l’un des moindres charmes de cet album.
Le CD contient plusieurs bonus. La chanson Can’t shake it loose est une reprise d’une ancienne composition de Clinton jouée par d’autres (Pat Lewis) : elle a déjà été interprétée par Diana Roos and the Supremes sur l’album Love child. Il s’agit d’une chanson au nom des Funkedelics demeurée inédite jusqu’en 1992. George Clinton donne ainsi l’impression d’avoir piqué aux Supremes sa propre composition. Suivent les versions singles de I’ll bet you et Music for my mother. On enchaîne avec un autre inédit des Funkedelics paru en 1992 : As good as I can feel, titre donc de 69 en réalité. Bons témoins de l’évolution rapide du groupe que ces deux titres des Funkedelics, l’un très soul tourné vers les Parliaments sixties, l’autre d’une grande finesse, un instrumental, mais soigné et classieux dans sa richesse élégante, avec surtout un son clair, pas de stupre sonore. Le 45 tours I’ll bet you a eu deux faces B possibles : ou bien le blues Qualify and satisfy de l’album, ou bien le titre Open our eyes ici livré juste avant la version 45 tours de Qualify and satisfy. Open our eyes, un titre de crooner, avec la guitare au loin qui semble dire que Funkadelic est bien là à piaffer en coulisses dans la magique ambiance du recueillement soul-gospel. Les gens qui se tiennent bien s’y retrouvent. Qui va donner l’alerte, avec les signes inquiétants à la fin du morceau ? Une version instrumentale en 45 de Music for my mother est donnée en dernier bonus. Le titre revient donc trois fois sur le CD. C’est toujours l’inconvénient des versions alternatives en bonus sur un CD, mais il fallait bien sauver tous ces chefs-d’œuvre.

37. Betty Davis :They say I’m different:

Bien qu’ils ne soient guère connus du grand public, les albums de Betty Davis ont été réédités deux fois en CD, une fois en boîtiers classiques, une fois en digipacks. Le second album est également excellent. Ce sera comme cela jusqu’au quatrième pourtant demeuré inédit à l’époque. Du premier album au second album, pratiquement tous les musiciens ont changé autour de Betty Davis. Même le bassiste Larry Graham n’est plus là. Après avoir écouté le premier album de son ex-épouse, Miles Davis l’a contacté pour lui conseiller de produire son album elle-même, tant son oreille est sûre. Les sessions auront le même profil que celles du premier album, mais Betty a en plus un travail de production. C’est au moment de la sortie de ce second album que Betty Davis monte enfin sur la scène. Elle avait attendu pour ne pas se retrouver piégée par la dynamique du music business. Aucune vidéo ne nous est parvenue de ces prestations, dont il ne reste que des photos et la légende sulfureuse.
Ce deuxième album est peut-être le plus modéré, le plus introverti. La musique funk balance. Certaines sonorités particulières se dégagent parfois. Les choses sont très posées. Le blues hypnotique de la chanson qui donne son nom à l’album est fascinant, les racines blues se font nettement sentir dans They say I’m different. Quel rhythm’n’blues avec plusieurs recettes dans les chœurs et les jeux de guitare, parfois aevec de la distorsion. Plusieurs motifs discrets se situent pourtant à un niveau magistral (piano, guitare, etc.). Un hommage est rendu à Chuck Berry dont le nom est feulé à un moment donné, annonce d’un prochain spécial hommage rock sur le prochain album. Le titre They say I’m different se termine en fade out, comme incomplet. On enchaîne avec le titre 70’s blues dont la première phrase vaut repère « I wake up this morning », mais les repères sonores et rythmiques du blues sont effectivement déplacées dans un bain sonore funk seventies à base de claviers. Le chant et la musique échangent dans l’enjouement quand roule le mot « blues ». Nous sommes dans le monde de la danse et du solo improvisé de guitare désinvolte, prenant ses aises, étirant quelques notes. Le sautillement deviendrait presque reggae, n’était son dynamisme. On enchaîne avec Special people avec des lignes jazz de piano, une atmosphère de contrebasse au fond du bar, un chant qui s’envole en clarté lyrique sur certaines fins de phrase. L’orchestration est très riche et classieuse, mais avec cette base blues-funk irrépressible. Avec son potentiel vocal limité, Betty Davis se débrouille habilement pour voyager sur certains registres que j’ai un peu de mal ici à présenter par les mots justes. Le morceau s’évanouit aussi avec ce côté non fini du morceau qui devient du coup aussi la note de non finition pour la sortie de l’artiste en fin d’album. Le morceau ne s’est pas vraiment arrêté, nous sommes passés dans la pièce à côté.
Les morceaux les plus âpres sont au début de l’album. Il s’ouvre par Shoo-B-Doop and cop him avec une importante présence du trio en chœur féminin. Les notes sont syncopées dans la distance. La tension est très rock, mais sur un rythme slow. Certaines sonorités étranges, osées apparaissent. Il y a du jeu dans un morceau puissant avec sa charge soul, sa pesanteur de relation chanteur et chœurs. C’est un morceau calme marqué de très fortes présences avec des montées soudaines dans une vitalité continue, mais contenue. Les instruments proposent un bain sonore et un entremêlement de leurs motifs respectifs. Le fade out est à l’ordre du jour pour clore les chansons. Le second titre commence par la phrase braillée He was a big freak. Le morceau démarre avec un super jeu structuré de clavier et des espèces de contre-temps dans les basses. C’est une fête musicale reposée, mais coupée par les quasi cris, les chuintements en tout cas d’une chanteuse excitée qui alterne toutefois avec des phrasés plus clairs, plus posés. On retrouve l’entremêlement des constantes du chant de Betty Davis, le roulement tendre et les dominantes gutturales. Aux deux tiers de la chanson, il y a un moment planant hyper bien amené, une sorte de temps magique. Puis on repart dans le rythme qui fait l’essentiel du morceau avec la voix forcée de Betty Davis qui communique son agressivité sexuelle, sa rage de vie. Nous enchaînons avec le balancement funk impeccable de Your mama wants ya back, un titre dansant exceptionnel qui pénètre les fibres musicales du corps humain. C’est à l’évidence une référence funk. L’instrumentation est en même temps complexe et riche. Un morceau vif enchaîne, à savoir Don’t call her no tramp. On retrouve une Betty Davis dans tout ce qu’elle affectionne en matière de musique funk envolée. Là encore les claviers prédominent. Les motifs se superposent, le rythme est syncopé, marqué de petits arrêts et d’effets complexes. Betty Davis tire ici certains effets étonnants de sa voix comédienne. Le morceau se poursuit sur une rage des rues, avec les chœurs, certains bruitages. Mais la fin dansante déborde tout, avec juste le « No no no » répété pour accentuer le sens du titre de la chanson tout de même en finale. Un titre » funk plus sauvage apparaît sur l’album avec Git in there. Dommage qu’il soit difficile de commenter des titres qui les uns après les autres montrent la réussite du groovfe d’une artiste funk d’exception. Le titre est alimenté par des échanges à plusieurs voix où quelques hommes donnent une note grave dans les basses. Il s’agit d’un titre pour se laisser aller.
Cet album offre quatre bonus tracks, mais aucune chanson inédite, juste quatre versions différentes de la moitié de l’album avec He was a big freak, Don’t call her no tramp, Git in there et 70’s Blues. Les morceaux ont été enregistrés au tournant de 1973-1974. L’album est sorti en 1974. J’ai encore deux albums géniaux à présenter de Betty Davis, voilà la bonne nouvelle. Je n’ai plus que deux albums géniaux à signaler à l’attention de la part de Betty Davis, voilà, en revanche, la mauvaise nouvelle.
Nous n’avons pu demander à Rimbaud pourquoi il avait renoncé à la poésie et comment il avait vécu cela. Le silence de Rimbaud n’ayant rien que de très naturel à mon sens, vu ce qu’il s’est passé, proposons-nous tout de même d’ouvrir une fenêtre sur les réponses de Betty Davis à ce genre de questions (simple précision, après ces trois premiers albums, Betty a enregistré deux albums au même titre qui sont demeurés inédits, seul le premier est génial, l’autre plus tardif est un peu désappointant malgré le papier qui signale notamment la collaboration de Marthe Reeves sans que je n’ai tout bien compris) :

-          Did you record any material after your fifth album ?
-          No.
-          Why not ?
-          I just didn’t.
-          Did you no longer have any interest in making music ?
-          I thought about it, but I just lost interest.
-          Why did you let music go ?
-          I just did, that’s all.
-          Have you missed it since ?
-          No.
-          When you stopped making music, what did you do instead ?
-          Nothing really.

35 & 36. Chocolate Watch Band : No way out / The Inner mystique, plus 44 et Melts in your brain… not on your wrist (the complete recordings !)

Dans la bonne tradition du rock « garage » sixties, le Chocolate Watch Band est le groupe de deux premiers albums remarquables, le troisième est déjà dispensable. Il s’agit pourtant et en outre de l’une des formations de référence du garage sixties. Attention, il n’a pas existé de catégorie garage sixties. Il s’agit d’une invention a posteriori. Il existe un courant de rock garage depuis le début des années 80 et l’étiquette garage s’est depuis lors appliquée à des groupes de rock sixties qui n’ont pas connu le succès, mais auxquels, par leur recherche de la chose rare méconnue sans passé commercial, les formations garage post 1980 ont contribué à étendre la dénomination garage. Il s’est dégagé comme un espace rock réservé aux connaisseurs qui n’écouteront pas que les succès dans le vent. En réalité, les groupes garage sixties sont des artistes rock qui n’ont simplement pas connu le succès. Il n’y avait aucune volonté d’échouer commercialement, ni l’idéologie du rock garage en tant que tel. En même temps, la quasi totalité de ces groupes ont une carrière éphémère qui peut se réduire à l’unique 45 tours sans même un curriculum vitae pour dire qui sont les interprètes. Les grands groupes garages sixties sont très souvent les artistes de deux grands premiers albums, soit que leur carrière se soit arrêtée là, soit que par la suite ils déclinèrent pour diverses raisons, soit que le nom du groupe cacha un changement de personnel (cas célèbre des Electric prunes). Il se trouve que le Chocolate Watch Band est l’une des formations les plus célèbres du rock garage aux côtés notamment des Shadows of knight. Le problème, c’est que leur histoire est compliquée. Le groupe fut à la merci de directives de studio et une partie de leur répertoire n’est pas jouée par eux, y compris sur les deux premiers albums, tandis que leur troisième album se révèle faiblard.
Ceci est d’autant plus piquant que, du coup, ceux qui savent que le Chocolate Watch Band est une référence majeure ne vont pas hésiter à prétendre que les versions de tels titres sont meilleures par le Chocolate Watch Band que par d’autres formations moins connues. Deux chansons sont concernées. Premièrement, la chanson In the past est une perle sublime. Pourtant, il s’agit d’une composition originale d’une formation garage sixties de Virginie We the people qui l’était pas si obscure que cela, même si elle n’a pas la légende et publicité du Chocolate Watch Band. Or, non seulement la version originale d’In the past est meilleure par We the people, mais la version attribuée au Chocolate Watch Band a été enregistrée à une époque de dissolution du groupe par une autre formation The Yo-Yo’s. En gros, celui qui prétend que la version In the past est meilleure par le Chocolate Watch Band que par We the people n’est pas seulement en train de se leurrer en croyant qu’il est évident de mettre le groupe californien au-dessus du sublime groupe de Virginie, mais il est en train de vous expliquer, sans s’en rendre compte évidemment, que les Yo-Yo’s sont un excellent groupe qui se situe entre le Chocolate Watch Band et We the people.
L’autre erreur consiste à considérer que la version de I ain’t a miracle worker par cette fois les authentiques Chocolate Watch Band est forcément meilleure par eux que dans la version antérieure d’un groupe aussi obscur que les Brogues qui n’existent qu’en 45 tours. Ephémères, les Brogues comptent deux futurs Quicksilver Messenger Service. Non pas Cipollina, mais déjà le guitariste Gary Duncan qui travaillait aux compositions du groupe.
Des erreurs en sens inverse peuvent être commises. Conscients que certains titres ne sont pas du Chocolate Watch Band, certains vont cracher sur la suite de perles psychédéliques enregistrées par les Yo-Yo’s. En réalité, comme pour In the past, la suite psychédélique n’est pas mauvaise du tout. Elle vaut toujours mieux que les enregistrements du troisième album où sont revenus d’authentiques membres du Chocolate Watch Band. Les titres enregistrés par les Yo-Yoz furent très bons, sauf qu’ils n’étaient du coup pas caractéristiques de ce qui fait qu’aujourd’hui encore on se mord les doigts de ne pas avoir su mettre en avant ce qui faisait le génie d’interprétation à part entière des authentiques Chocolate Watch Band. Enfin, sur certains titres, la voix du chanteur original Dave Aguilar du Chocolate Watch Band n’apparaît pas, au profit de la voix plus théâtrale et classique de Doug Bennett. Mais, Doug Bennett n’est pas une mauvaise contribution en soi à un moment où il faut finir d’enregistrer les morceaux d’un groupe provisoirement dissout. Doug Bennett a d’ailleurs amené une composition au groupe. Quant aux versions de ces mêmes chansons chantées par Dave Aguilar sur la compilation Melts in your brain, il s’agit d’enregistrement vocaux ratés 27 à 28 ans après la saisie des parties instrumentales.
Résultat des courses, il est intéressant de comprendre ce qu’il s’est passé et à quel point le Chocolate Watch Band a été traité comme un groupe de studio non propriétaire de son nom d’artiste. Il est important de déterminer ce qu’ils ont précisément enregistré. Mais, pour le plaisir de l’écoute, on ne peut que donner tout faux à l’anthologie Melts in your brain : elle réunit l’intégralité des enregistrements sur deux CD, mais avec la bêtise de philologues qui ne songent même pas qu’ils vont tout gâcher. Le superbe single stonien est précédé des faux départs. Quelle puissance de vue ! Certains titres mitigés des débuts précèdent les temps forts réels des deux premiers albums. Mieux encore, les versions réenregistrées en 2005 avec la voix de Dave Aguilar sont présentées dans le corps des productions d’époque et les interprétations vocales de Doug Bennett, meilleures puisque d’époque, etc., sont repoussées sur le second CD. Les deux grands albums sont disloqués, et les chansons des Yo-Yo’s tendent à être reportées à la fin du second CD après la série de ratages du troisième album que peu de gens écouteront bien volontiers, y compris parmi les fans connaisseurs en sixties bien évidemment. Bref, l’anthologie Melts in your brain ne me paraît pas du tout indiquée pour apprécier le Chocolate Watch Band. Pour ma part, j’écoute directement les deux albums tels quels No way out et The Inner mystique que je possède réunis sur un seul CD. Cela peut suffire comme achat, puisque l’autre chef-d’œuvre en single Sweet young thing figure au moins sur le premier coffret Nuggets. J’ai tout de même acheté la compilation 44 pour récupérer l’œuvre en 45 tours, je l’écoute en sélectionnant ce qu’il y a de meilleur, notamment l’original Loose lip sync ship. Je privilégie bien sûr les deux albums originaux, et je n’écoute pour ainsi dire jamais la compilation Melts in your brain, achetée par acquis de conscience sur le tard, ni donc ce troisième album raté qui y figure.
Deux titres ont été enregistrés sous le nom The Hogs. En face A, la reprise instrumentale de Dave Allan and the Arrows, le fameux Blues theme présent sur le premier coffret Nuggets est anecdotique. C’est la face B qui retient l’attention avec Loose lip sync ship qui, terrible humiliation, sera retravaillé avec les Yo-Yo’s pour réapparaître avec changement de titre sur le second album du groupe, raison de plus pour acheter un CD en plus des deux albums servis tels quels. Nous sommes en 1966. Mais, cette année-là même, sort un 45 tours exceptionnel. En face A, nous avons droit à une création stonienne d’Ed Cobb (inspirée de Paint it black pour partie) Sweet young thing qui, heureusement, n’a pas rejoint le répertoire d’à mon sens les un peu mitigés Standells, mais celui des fabuleux Chocolate Watch Band. La face Baby blue est une géniale reprise du It »s all over now baby blue déjà transcendé par Van Morrison et ses Them. J’avoue apprécier le single de chansons plus douces Misty lane et She weaves a tender trap, ce dernier titre étant d’Ed Cobb lui-même.
Bon, maintenant, j’en viens au moment où je dois avouer lâchement que, bien paresseux, je ne vais pas me lever pour saisir mon CD des deux premiers albums du groupe. Il est censé y avoir tout sur le Melts in your brain. Seul inconvénient, pas facile de recomposer le contenu de chacun des albums avec leur façon de présenter les choses. Même les références de disques après chaque titre posent problème. A l’évidence que certains titres furent édités plusieurs fois, je pige que dalle. Donc, en gros, et sans doute dans le désordre, sur le premier album, vous allez voir les perles suivantes très représentatives du génie particulier au groupe : Let’s talk about girls avec la voix de Doug Bennett qui assure n’était une petite tendance à la manière appuyée exagérée, Don’t need your lovin’ (à moins que ce titre ne soit pas sur le premier album, plutôt sur 44, mais peu importe il entre bien dans la série), Sitting there standing (même remarque et même là j’en suis encore plus sûr), Are you gonna be there (at the love in) qui est une co-composition de Bennett avec la voix d’Aguilar (eh oui !), No way out (inflexion déjà très psychédélique pour une composition d’Ed Cobb le grand, sauf qu’il a plagié… un morceau de jam demeuré inédit des Chocolate Watch Band, Psychedelic trip qui figure sur l’intégrale avec les vrais crédits d’auteur), des reprises de Wilson Pickett et Chuck Berry : In the midnight hour chanté par Doug Bennett qui assure et Come on qui est surdéterminée par l’exemple des Rolling stones en 63 bien que l’original soit superbe, puis le franchement psyché digne du second album Gone and passes by qui est une composition du chanteur David Aguilar. Fuck the Yo-Yoz. Sur cet album, on trouve encore Hot dusty road et Gossamer wings. Le premier de ces deux titres (une reprise du premier album de Buffalo Springfield signée Stephen Stills) est chanté par Doug Bennett et il assure. Mais, le second titre, par qui est-il chanté ? Eheh, ce serait une autre composition de Don Bennett pour le groupe.  Pourquoi je l’appelle Doug, c’est pas Don ? Mais, attention, c’est plus retors que ça car Gossamer wings plagie la face B Loose lip sync ship composée David Aguilar et Mark Loomis. Il y a encore des titres psychédéliques sur ce premier album à tel point que l’enchaînement des deux albums avec passage par les Yo-Yoz se fait tout naturellement sur mon CD double album. Et yipee yipee yé. Ce sont Dark side of the mushroom et Expo 2000. Ce sont deux compositions attachées à un certain Richie Podolor. Voilà, tous les titres que je viens de citer sont géniaux et vous n’en voudrez pas à Don Bennett de remplacer David Aguilar au pied sur le chant de certains morceaux, puisqu’Aguilar ne s’était même pas donné la peine d’enregistrer sa voix sur la musique de ses compères.
Passons au deuxième album. Cela commence par un titre de The Inmates avec le chant de Don Bennett Let’s go, Let’s go, Let’s go, un parfum de Chocolate Watch Band, mais un parfum seulement, puisque ce n’est pas le groupe.  Il s’agit d’une reprise de Hank Ballard, celui qui a inventé le titre The Twist que bien sûr ne manqua pas de reprendre Chubby Checker. Suit la série des interprétations des Yo-Yoz. Nous avons droit à Voyage of the Trieste signé Ed Cobb, In the past composition de Proctor reprise à We the people et The Inner mystique, autre composition d’Ed Cobb le grand. Inconscient des histoires de Yo-Yoz à l’origine, ne connaissant pas même We the people, j’ai adoré ces trois titres comme trois coups de génie du groupe. C’est pour cela que l’entreprise de charité de la compilation Melts in your brain me paraît bien vaseuse avec sa redistribution et ses réenregistrements avec la voix de David Aguilar vieux, longtemps, longtemps après les faits.
Nous continuons avec un remix de la reprise de Dylan It‘s all over now, baby blue. Sur Melts in your brain, le titre est raccourci en Baby blue. C’est évidemment superbe. Venge-toi, David Aguilar ! Vient alors si mes souvenirs sont bons une chanson que j’adore. Comme Sweet young thing s’inspirait de Paint it black, Medication s’inspire de Satisfaction. Voyez la rime du titre et le riff. Mais, le morceau a son originalité propre et c’est vraiment prenant. Les compositeurs sont de parfaits inconnus que je sache : Minette Alton et Ben Ditosti. Ce n’est pas que le morceau soit génialement élaboré, mais il a la note juste surfant habilement sur la force du morceau qui l’inspire. Une autre reprise à se mettre à genoux avec le I’m not like everybody else obsessionnel et hystérique des Kinks. Il me reste à évoquer leur grand titre I ain’t a miracle worker, jsute que je les ai justement un peu sabrés là-dessus en rappelant la version des Brogues. A noter tout de même que ce titre superbe est une création de deux compositrices d’une partie du répertoire des Electric prunes, à savoir Nancy Mantz et Annette Tucker.
Le double CD d’intégrale du groupe contient certains titres inédits. Deux plages de versions différentes de deux titres connus sont présentées comme des backing tracks : Let’s go, let’s go, let’s go par The Inmates et Psychedelic trip. Il y a aussi une variante de Voyage of the Trieste intitulée The Uncharted sea par The Yo-Yoz.
 En 1983 a été éditée une reprise de Milk cow blues, témoin au passage d’une influence plus grande des Kinks. Deux titres furent édités en 1993 : Don’t let the sun catch you crying et une reprise des Everly Brothers, Since you broke my heart. Cela doit déjà faire partie de la dynamique faible du dernier album. Nous sommes loin des Everly brothers pour ce qui est de la reprise elle-même. Bon, je passe sur les titres décevants composés par les membres authentiques du groupe, mais sans David Aguilar tout de même. Je donne la liste de ce qui n’est pas très bon, de ce qui montre le groupe sous un jour franchement méconnaissable : Uncle Morris (un peu à la Moby Grape), How ya been (inspiré de Steve Marriott des Small faces, mais sans le niveau), Devil’s motorcycle, I don’t need no doctor, Flowers (imitation d’Arthur Lee et Love qui a son charme, mais pas le niveau), Fireface, And she’s lonely.
Au final, c’est le chanteur David Aguilar qui s’est fait le plus malmené au sein du groupe. Il ne chante pas sur plusieurs titres, faute d’avoir enregistré à temps quand le groupe était fonctionnel. Ensuite, deux compositions où il est visiblement pour quelque chose sont tombées dans les mannes respectives d’Ed Cobb et Don Bennett. Psychedelic trip est devenu No way out et Loose lip sync ship est devenu Gossamer wings. Et c’est un fait que l’orientation et le potentiel psychédéliques étaient dans la formation authentique, comme en témoigne encore ce titre composé par David Aguilar seul : Gone and passes by. Je n’ai pas encore eu le courage de lire le livret de Melts in your brain, même si je suis parvenu à tenir cette notice. Pas grave. J’en ai déjà dit pas mal.

33 et 34. The Easybeats : It’s 2 easy / Volume 3 (The Complete Easybeats 6 CD

Je n’ai pas commencé ma collection par les albums des Easybeats. Un jour, j’accompagne un ami dans ses achats et je le vois se tâter pour un ou deux CD de ce groupe. Il se retrouve alors sous le feu croisé des conseils de deux vendeurs réellement avisés, sauf que le premier déconseille les albums du groupe et considère qu’une bonne compilation peut suffire, pendant que le second proteste et dit que les albums sont très bons, que les Easybeats ont produit plusieurs morceaux du calibre de leur classique universellement connu Friday on my mind. Deux albums sont dans les rayons et mon ami est reparti avec. L’un s’intitulait Friday on my mind. Il contenait des titres forts, mais, s’il semblait s’agir d’un best of, il était vrai que l’on pouvait rester sur sa faim, bien que ce fût très bon dans l’ensemble. Sans parler d’autres titres majeurs qui figurent à leurs places sur d’autres albums, cet album en partie de compilation offre tout de même le titre parfait de 45 tours Friday on my mind et aussi un génialissime Heaven and hell méconnu. L’autre album s’intitulait Friends. Il devait s’agir de l’œuvre finale du groupe sans aucun titre phare. L’album Friends ne s’écoute pas vraiment et d’ailleurs, alors qu’il possédait un brillant compositeur avec Young (tantôt assisté par Wright, tantôt par Vanda), le groupe jouait ici les compositions de quelqu’un d’autre. Je n’ai jamais acheté l’album Friends par la suite. Mais, quand à mon tour j’ai acheté un album des Easybeats, j’ai commencé par leur troisième album intitulé Volume 3 et j’ai découvert une superbe suite de morceaux, notamment cette ouverture Sorry à une époque où je ne connaissais pas encore sa reprise par Roy Loney. J’ai rapidement enchaîné avec les deux premiers albums : Easy et It’s 2 easy. Le premier est pas mal, le deuxième m’a marqué par une fameuse accumulation de temps forts. Mon CD It’s 2 easy, en provenance de Russie, m’est arrivé tout gondolé dans la boîte aux lettres. Puis, j’ai découvert que circulait en Australie un coffret de l’intrégrale des Easybeats en six CD. J’ai foncé. J’ai retrouvé les trois premiers albums avec les mêmes bonus tracks, ainsi que l’album particulier Friday on my mind dont je comprenais bien dès lors qu’il n’était pas un best of en tant que tel. Le coffret contenait encore le cinquième album du groupe, le chef-d’œuvre méconnu Vigil et un super album encore d’inédits The shame just drained (previously unreleased tracks). L’album Friends avait été intelligemment exclu de ce qui se présentait comme The Complete Easybeats (6 CD Box Set. The Ultimate collection). Par rapport à l’achat séparé des albums à bonus tracks, il n’y a que deux légers changements. Les boîtiers sont plus fins et le pressage du papier est à peine retouché. Le coffret tend à la sobriété pour chaque CD, mais l’essentiel est dans le livret bleu qui accompagne le tout. Le texte est sommaire, mais le scrupule est mis sur les détails qui font les différences entre plusieurs versions d’un même titre, ce qui reste assez sympathique.
Le cas des Easybeats est un peu particulier. Durant leur courte carrière, ils furent prolifiques et il existe malheurusement plusieurs déchets, plusieurs chansons qui n’en valent guère la peine, ce qui fait que l’écoute complète d’un album n’est pas évidente à cause des inégalités qui peuvent se faire ressentir. Je dirais que, pour moi, le plus prenant que j’écoute parfois en boucle n’est autre que it’s 2 easy, bonus compris. Volume 3 et Vigil ne m’en imposent pas autant pour ce qui est de l’écoute en boucle, bien que, selon moi, le déchet ne soit pas prégnant sur ces deux autres opus. La présence de déchets, c’est en ce sens que l’idée de privilégier une compilation peut se comprendre. Ceci dit, dans la quantité, il y a beaucoup de perles et au final de très grands groupes n’ont pas vraiment produit autant de titres géniaux que les Easybeats, et ce paradoxe fait qu’une compilation risque de priver l’amateur de beaucoup de perles de la part du groupe. En tout cas, trois albums sont d’une force évidente. It’s too easy et Volume 3 sont les chefs-d’œuvre de la période à succès du groupe, le sommet de l’époque jouissive. Ils ne contiennent pas Friday on my mind, mais d’autres perles. L’autre chef-d’œuvre est Vigil, un album beaucoup moins rentre-dedans au niveau commercial, mais une œuvre ambitieuse, soignée, aux très belles compositions, avec des participations vocales notables de la jeune Olivia Newton-John et de Steve Marriott des Small Faces. Quel dommage que ce soit la dernière œuvre créée par la paire de compositeurs Vanda et Young.
Le rock semblait être l’affaire des Etats-Unis, du Royaume-Uni, et de l’Irlande encore pour quelques individualités fortes. Une scène suédoise a fait une certaine impression dans les années 80 et au début des années 90. Mais, l’Australie a fini par rejoindre la force des mouvements anglais et américains avec plusieurs formations talentueuses dès les années 70, que le succès commercial fût ou non au rendez-vous. Or, le meilleur groupe de rock australien a devancé cet âge d’or du pays, il s’agit des Easybeats eux-mêmes qui laissèrent plusieurs plages exceptionnelles dans les années 60, des plages qu’aucun groupe australien n’a égalées depuis. Les Easybeats sont un grand groupe sixties.
Au plan des individualités, le groupe n’est pas véritablement australien. Harry Vanda est néerlandais ainsi que le bassiste Dick Diamonde, George Young est écossais, Stevie Wright est anglais et Gordon « Snowy » Fleet vient de Liverpool, mais il laissera la place après le troisième album à un nouveau batteur Tony Cahill. George Young est le frère des Young qui allaient former AC-DC et, justement, Harry Vanda et George Young produisirent les six premiers albums du groupe AC-DC. Evidemment, les naïfs et bourrins ne manqueront pas de répondre qu’AC-DC est le plus grand groupe de rock australien. Avis impossible à partager par les connaisseurs qui préfèreront les Saints, voire d’autres formations encore qui ont autre chose à faire écouter que des voix éraillées et du son hard rock de gros bébés, et bien sûr ils citeront surtout les Easybeats.
En CD, notre Volume 3 contient 24 titres. Les 13 premières plages représentent l’album original et cela est suivi de onze bonus tracks. Sur les treize titres, les perles tombent : Sorry, Funny feelin’ (intro guitare inspirée des Who, mais suite bien inventive), Say you want me (quelque chose de grandement Kinks),  Going out of my mind (super titre avec intro guitare s’inspirant d’un titre soul célèbre),

La merveille absolue Sorry sera reprise par Roy Loney sur son album Contents under pressure, tenant compagnie à une autre reprise géniale de Heartful of soul des Yardbirds.
Difficile de partir à la quête de titres faibles. Sûrement pas You said that, Promised things, Today, Dance of the lovers, ni même Not in love with you, The Last day of may, My my my, voire Can’t you leave her. A la limite, What do you want babe est un titre moins intéressant pour se faire plaisir. Peut-être que l’album se ponctue précisément par ces deux titrds les moins percutants.
Passons aux 11 bonus tracks. La reprise de Presley Hound dog vient de l’album Good Friday, lequel ne fait justement pas partie du coffret de l’intégrale des six albums pour ceux qui suivent. Nous enchaînons avec deux versions différentes de Do you have a soul ? et Saturday night, titres sur lesquels nous reviendrons quand nous traiterons de l’album Friday on my mind. Suit un instrumental inédit des mêmes sessions que les deux titres précédents à l’Olympic studios My old man’s a groovy old man. C’est génial et ça se loge impeccablement dans un coin du souvenir comme un titre marquant. Je passe sur le medley Historeasy. Suivent cinq titres de leurs premières sessions d’enregistrement et ça y va. Beau témoignage avec Mean old lovin’, I’m happy, Hey babe, I don’t agree et Keep your hands off my babe. Le manque de rodage se sent un peu, mais aussi l’enthousiasme fébrile. Mean old lovin’ le fait bien, I’m happy sans être parfait est appréciable dans son ambition, Hey babe est touchant, I don’t agree est un peu juste, Keep youir hands off my babe a déjà beaucoup en dépit de certaines maladresses, à tel point qu’on peut regretter que le titre n’ait pas été développé sur un album, surtout son riff dans les couplets. Nous passons brutalement pour clore cette série de bonus tracks à un titre de 1968 I’m just trying, une chute du Central Sound Studio. C’est génial cette façon de poser la voix. Mais pourquoi ce ne sont pas plutôt les musiciens d’AC-DC qui ont continué à produire les albums du génial frère aîné ? C’est pas poh-ssible.
Remontons encore dans le temps. Le second album It’s 2 easy comporte en principe 14 titres. Un nombre élevé de chefs-d’œuvre s’en détachent : Women (make you feel alright) (titre repris par les Plimsouls sur leur premier album), Come and see her (grande élaboration musicale à climax avec cette prise de risque pour la ligne de titre répétée avec une voix bien grave exagérée), Easy as can be, I can see, Somethin’ wrong. Ces titres aux beautés vertigineuses sont ceux d’un tout grand groupe. Fascination oblige !, les Easybeats subissent alors une très nette influence des Beatles (un très bon Someway, somewhere, Then I’ll tell you godbye, la composition très courte de leur membre liverpoolien Gordon Fleet What about our love), on pense aux Beatles première époque forcément, mais je ne vois pas les titres faibles. Tout le reste demeure de haute volée : Let me be, You are the light, Sad and lonely and blue, excellente ballade rhythm’n’blues sucrée, déchirée In my book, fin d’album réussie avec le dynamique Wedding ring, un des hits australiens du groupe. Même le titre qui mérite une réserve a sa particularité et n’est pas faible à proprement parler : I’ll find somebody to take your place. Pour acheter un album, il faut que les trois quarts soient à la hauteur. Ici, tout est remarquable et il y a cinq titres géniaux. Aucun déchet à mes yeux dans le second album des Easybeats, ce que les marqueurs n’ont pas assez observé. Bien sûr, il y a maintenant les 11 bonus tracks. Eh bien, ces bonsu sont géniaux. Je suis dingue de cette balalde en marge du rock Me or you, face B de je ne sais quel titre majeur de ce second album sorti en single. Il y a même quelqu’un qui siffle. J’adore cette mélancolie et ce style, ça rejoint même les cinq titres majeurs de l’album pour moi. Et je dois encore parler de Mandy, le dernier bonus tracks, la queue de comète du CD, carrément tripant. Ce titre des Abbey Road sessions rejoint implacablement pour moi les titres majeurs de ce second CD. Je suis fanatisé et je note su’il s’agit d’une composition de George Young seul. Normalement, sur les trois premiers albums, il coécrit avec Stevie Wright, avant la relève d’Harry Vanda. Evidemment, la version mono du single Friday on my mind n’appelle aucun commentaire, pouisque c’est le sommet des Easybeats. Les fans des Easybeats ont raison de ne pas vouloir limiter le groupe à ce seul titre, tant ils ont aligné les trucs géniaux, mais quand même là c’est le chef-d’œuvre sans contredit possible.
Parmi les bonus, Happy is the man et Made my bed (Gonna lie in it) dans des versions alternatives anticipent sur l’union des compositeurs Vanda et Young pour le quatrième album. Les deux chansons sont excellentes dans tous les cas. Un inédit très Beatles apparaît aussi : How you doing now. Toujours pas de temps faible. Le titre All gone boy (Million dollar baby) provient du Good friday album. J’ai oublié ce qu’il était, sans doute une œuvre australienne à part. Le titre est par endroits suffisamment rehaussé que pour ne toujours pas être faible.
Enfin, en bonus, nous avons droit aux quatre titres d’un EP. Too much est un peu gentil pour rester mémorable, il est tout de même bien torché. I’ll make you happy relève le niveau. Son amorce vocale fait songer à l’un des rares succès de Billie Davis. Il s’agit encore d’un très bon morceau entraînant. Les Easybeats s’abandonnet au plaisir, peu importe comment ils seront perçus. De toute façon, ils seront bien difficiles encore une fois à critiquer. On comprendra qu’un morceau des Easybeats ne se commente pas ainsi. Le titre A very special man est lui encore très bon, aisément identifiable dans son originalité comme du Easybeats. Pour Tryin’ so hard, j’en connais qui ont mis les Kinks du début sur leurs platines, l’intro… Encore un bon titre. Victoire totale des Easybeats, ils ont réussi l’album sans la moindre rogne qui s’attend au coin du tour. 25 titres et pas un déchet, comme le veut la légende, et ça swingue. Peut-être que certains n’aimeront pas ce swing, cette façon de tout contrôler dans des morceaux qui poussent au vertige. Pourtant, c’est le plus grand groupe de rock australien, le seul à aligner les chefs-d’œuvre. Moi, ce second album m’enthousiasme.
La prochaine fois, je traiterai des deux albums où il y a effectivement de bonnes inégalités et donc des compositions plus faibles, le premier et le quatrième.